Dada
Mouvement artistique
Le mouvement dada, ou dadaïsme, est un mouvement intellectuel, littéraire et artistique du début du XXe siècle, qui se caractérise par une remise en cause de toutes les conventions et contraintes idéologiques, esthétiques et politiques.
Dada est issu d’une filiation expressionniste et sa véritable naissance est le Manifeste littéraire, publié sous forme de tract, en février 1915, à Berlin, par Hugo Ball et Richard Huelsenbeck. Ceux-ci, en se déclarant « négativistes », affirment : « Nous ne sommes pas assez naïfs pour croire dans le progrès. Nous ne nous occupons, avec amusement, que de l’aujourd’hui. Nous voulons être des mystiques du détail, des taraudeurs et des clairvoyants, des anti-conceptionnistes et des râleurs littéraires. Nous voulons supprimer le désir pour toute forme de beauté, de culture, de poésie, pour tout raffinement intellectuel, toute forme de goût, socialisme, altruisme et synonymisme. » C’est à partir de ce texte que s’esquisse la position spécifique de dada.
Dada connaît notamment une rapide diffusion internationale. Dada met en avant un esprit mutin et caustique, un jeu avec les convenances et les conventions, son rejet de la raison et de la logique, et marque, avec son extravagance notoire, sa dérision pour les traditions et son art très engagé. Proche de l'idéologie socialiste, voire anarchiste pour Tzara, ou même Hausmann, Dada se démarque à l'époque pour sa proximité avec le militantisme radical. Les artistes de dada se voulaient irrespectueux, extravagants, affichant un mépris total envers les « vieilleries » du passé. Ils cherchaient à atteindre la plus grande liberté d'expression, en utilisant tout matériau et support possible. Ils avaient pour but de provoquer et d'amener le spectateur à réfléchir sur les fondements de la société. Ils cherchaient également une liberté du langage, qu'ils aimaient lyrique et hétéroclite.
Le déclenchement de la Première Guerre mondiale a transformé la capitale de la Suisse alémanique qu'était Zurich, en berceau d'un mouvement artistique inédit dont le « nom écrin », dada, fut trouvé dans des circonstances légendaires et controversées en février 1916.
Début 1916, Hugo Ball, écrivain, traducteur de littérature française (Henri Barbusse, Léon Bloy, Arthur Rimbaud) et dramaturge allemand, exilé depuis 1915, et sa compagne, Emmy Hennings, poète et danseuse, fondent le Cabaret Voltaire et en annoncent l'ouverture, dans la presse zurichoise, pour le 2 février. Ils invitent les « jeunes artistes et écrivains dans le but de créer un centre de divertissement artistique, […] à [les] rejoindre avec des suggestions et des propositions[2] ».
Hugo Ball a l'idée de mêler la tradition des cabarets parisiens de la fin du XIXe siècle avec l'esprit du cabaret berlinois d'avant-guerre, sous la figure emblématique de Voltaire dont il admire l'opposition à la religion. Quelques jours auparavant, Marcel Janco, à la recherche d'un travail, passe dans la Spiegelstrasse, située dans le quartier mal famé de Zurich. Il entend de la musique sortir d'une boîte de nuit et « découvre un personnage “gothique”' jouant du piano ». C'était Hugo Ball. Quand ce dernier apprend que Janco est peintre, il lui offre les murs du cabaret pour exposer. Janco revient au cabaret accompagné de ses amis, Hans Arp, Sophie Taeuber et Tristan Tzara.
L'inauguration a lieu le 5 février, la salle est comble. Le mot « dada » est trouvé quelques jours après. Selon Henri Béhar, « pour tout le monde, désormais, dada est né à Zurich le 8 février 1916, son nom ayant été trouvé à l'aide d'un coupe-papier glissé au hasard entre les pages d'un dictionnaire Larousse. Gardons-nous de ne pas croire aux légendes[5] » ! Dans une lettre de janvier 1921 adressée à des artistes new-yorkais, Tzara explique les circonstances de l'invention du nom dont il se garde de revendiquer la paternité : « […] j'étais avec des amis, je cherchais dans un dictionnaire un mot approprié aux sonorités de toutes les langues, il faisait presque nuit lorsqu'une main verte déposa sa laideur sur la page du Larousse — en indiquant d'une manière précise dada — mon choix fut fait[6]. »
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